Après trente ans d’absence, Haret revient au Brésil, invité à présenter son livre, un roman qui se déroule dans la région du Mato Grosso. Ce retour tant attendu prend rapidement une tournure inattendue : à peine arrivé, il est confronté à une réalité bien différente de ce qu’il imaginait. Il découvre non seulement les conséquences de son départ trois décennies plus tôt, mais aussi l’impact inattendu de son œuvre sur ceux qui y reconnaissent leur propre histoire. J’avais adoré la trilogie des Yeruldelgger pour son souffle, son intensité et la richesse de son univers. Ce nouveau roman est différent dans le ton et le rythme, mais je retrouve malgré tout ce qui m’avait tant plu chez Ian Manook. La construction narrative est particulièrement réussie : un récit enchâssé mêlant passé et présent, où le roman dans le roman soulève des questions fascinantes sur la frontière entre fiction et réalité, sur la responsabilité de l’auteur, et sur la place qu’occupe le narrateur dans tout cela. Une lecture prenante et intrigante.

“Dans ma jeunesse tumultueuse et au bout de ces deux ans de voyage, comme une dégringolade en panique à travers l’océan et les Amériques, Angèle ressemble au premier sable chaud où la mer m’échoue et qui me donne à la fois l’expérience et de l’île et des vagues. Ou bien à une ancre plantée dans les eaux claires et que chatouilleront des poissons apprivoisés. Cette ancre dont la chaîne va casser ou que, mû par quelque suicidaire habitude, j’aurai lentement remontée. À moins que j’aie toujours pris garde à ce qu’elle ne touche jamais tout à fait le fond, donnant à mes départs des courants de dérive.”