Invitée par la Société de lecture de Genève le 4 novembre, Muriel Barbery nous parle de sa passion du Japon et de son dernier roman “Une Rose seule” paru en 2020. Interrogée par Alexandre Demidoff, c’est un entretien empreint de douceur. Muriel Barbery explique que ce qu’elle voulait avant tout était d’écrire, et non de publier, et qu’elle s’étonne encore à présent d’être un écrivain qui peut vivre de sa plume. Elle raconte qu’elle explore encore, qu’elle doit changer de genre à chaque roman, que des thèmes surgissent à chaque fois de nulle part, que ce n’est pas un livre qui la transforme, mais toute son œuvre dans sa continuité. Que ce dernier roman qui se passe à Kyoto, elle a mis 15 ans à l’écrire, à oser l’écrire. Un roman de jardins, de fleurs, de deuil et de renaissance. Très tendre conférence.

“- Il y a cette phrase qui revient et sur laquelle je voulais vous entendre qui est “Nous marchons en ce monde sur le toit de l’enfer en regardant les fleurs”.
– Alors ça, c’est de Issa, c’est pas de moi celui-là, c’est vraiment bien de Issa. Issa est un de mes poètes japonais favoris et ces haïkus m’accompagnent depuis longtemps et celui-ci “Nous marchons en ce monde sur le toit de l’enfer en regardant les fleurs”, je l’ai lu il y a une dizaine d’années à peu près et le lisant d’abord je me suis dit que c’était une cristallisation et un résumé de l’essence de l’existence absolument sidérant. Comment en trois vers peut-on avec une telle acuité, avec une intelligence aussi aiguisée, rendre compte de l’enfer et des fleurs de l’existence, du balancement qui est le nôtre en permanence entre les fleurs du plaisir et les souffrances de l’enfer. J’ai été bouleversée par ce qui me bouleverse toujours dans la poésie japonaise, c’est-à dire chez les grands poètes, l’aptitude de dire tout avec presque rien.”

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