Un texte mi-fiction, mi-essai. La première partie est un récit autobiographique sur la commande d’un conte. La deuxième partie est le conte en question, une jeune femme qui doit se souvenir du nom de son bienfaiteur, le diable, car sinon il l’emportera un an plus tard aux Enfers. Mais ce nom lui échappe, elle l’a pourtant sur le bout de la langue. Une troisième partie mêlant autobiographie et réflexion autour de ce mot sur le bout de la langue, de tous les mots perdus et de leur signification, en puisant dans des références mythologiques et philosophiques. Pas toujours facile de suivre le fil de la pensée de l’auteur, mais de très beaux textes.

“Pourquoi les femmes deviennent-elles des Mères? Pourquoi les femmes font-elles des enfants? Les Mères font des enfants pour repousser la mort dans la chaîne des générations. Elles passent le relais qui brûle les doigts dès qu’elles les ont approchés du centre du foyer vivant. Elles passent le relais de ce qui les horrifie; elles passent l’image de ce qui ne peut être vu en face; elles refilent la face qui n’a pas de visage. Elles confient le soin de hurler à des plus jeunes parce qu’elles n’ont pas le courage d’assumer seules l’enfer, parce qu’elles n’ont jamais témoigné du désir d’interrompre le cours du cri de la mort. Les Pères transmettent un nom qui par lui-même ne signifie rien. Ils refilent le langage. Les femmes déplacent le poids de la mort sur le dos des enfants qu’elles font dans la douleur, la bouche ouverte, hurlantes. Elles passent l’origine. Les Pères transmettent le nom. Les Mères transmettent le hurlement.”