Sylvain Tesson part en expédition au Tibet accompagné du photographe animalier Vincent Munier, de son amie Marie et de Léo, aide de camp. Leur but ultime est de rencontrer la panthère des neiges. Sur ces hauts plateaux du Tibet où il fait -30oC, Sylvain Tesson, celui qui adore bouger, apprend l’immobilité et l’attente, en tout cas celle du corps physique, car pendant ce temps, son esprit s’active. Cela donne un texte magique et magnifique avec des observations de la faune, des jeux de vie et de survie le long de cette chaîne alimentaire, mais aussi des réflexions plus philosophiques sur la place de l’humain dans cette chaîne, sur la façon dont nous détruisons tout, sur notre besoin d’être perpétuellement dans le mouvement. Et comme ultime leçon de ce livre, appliquer l’affût quotidiennement, pour découvrir toute la beauté qu’on oublie d’observer.

“Dans la soupe barbotèrent les données biochimiques. La vie apparut et se distribua à la conquête de la Terre. Le temps s’attaquait à l’espace. Ce fut la complication. Les êtres se ramifièrent, se spécialisèrent, s’éloignèrent les uns des autres, chacun assurant sa perpétuation par la dévoration des autres. L’Évolution inventa des formes raffinées de prédation, de reproduction et de déplacement. Traquer, piéger, tuer, se reproduire fut le motif général. La guerre était ouverte, le monde son champ. Le soleil avait déjà pris feu. Il fécondait la tuerie de ses propres photons et il mourrait en s’offrant. La vie était le nom donné au massacre en même temps que le requiem du soleil. Si un Dieu était vraiment à l’origine de ce carnaval, il aurait fallu un tribunal de plus haute instance pour le traduire en justice. Avoir doté les créatures d’un système nerveux était la suprême invention dans l’ordre de la perversité. Elle consacrait la douleur comme principe. Si Dieu existait, il se nommait souffrance.”

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