C’est l’histoire d’un père, d’un père égoïste, manipulateur, blessant. Le centre du monde, c’est lui. La mère de ses enfants, ses enfants, sont des êtres collatéraux. Il a un rêve, reprendre la propriété qui appartenait à sa famille, mais revendue, une propriété ailleurs au sud, avec une exploitation de bois. Il arrachera ses enfants à leur mère, séparera la fratrie, leur fera subir ses folles attentes et son alcoolisme destructeur. Écrit du point de vue d’un de ses fils, transpire malgré tout l’amour d’un enfant pour son père, quasi inconditionnel même quand les conditions sont incohérentes. Une histoire d’amour filial très bien décrite, touchante et triste, avec un magnifique trait de crayon expressif dans une palette de couleurs limitées.

“Gabriel ce soir-là est rentré avec une conscience plus lourde que celle d’un criminel de guerre. Non pas que la situation fût nouvelle, ou que personne ne l’ ait mis en garde sur ce qu’occasionnerait chez Martin la séparation de la fratrie. Mais Gabriel faisait partie de ces personnes qui ignorent purement et simplement les sentiments, pour autant qu’elles ne les éprouvent pas elles-mêmes. En revanche, il suffisait qu’il en fasse l’expérience intime, pour que ce sentiment, jadis remisé dans les recoins de sa conscience, se trouve propulsé au premier rang de ses préoccupations… Qu’il prenne une force nouvelle, impérieuse, cataclysmique. Pour cela, Gabriel s’était toujours défini comme un sensible, un émotif, quand en vérité, il n’était rien de plus qu’un impulsif doublé d’un égoïste.”

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