Rature, c’était son surnom d’enfant et maintenant le nom de son bateau. La mer, la pêche, c’est toute sa vie. Dans laquelle il y a aussi sa femme et son fils. Il a failli perdre son fils à la mer, puis l’a quand même perdu. Le fils s’en est allé, en colère, ne voulant pas de cette vie de marin. La vie continue, teintée de tristesse et de ressentiment. Mais quand la mer vous tient… Une histoire un peu comme un conte, magnifiquement illustré. Une grosse larme sur ma joue à la fin.

“Parfois il avait de drôles de pensées. Des pensées de père triste. Inconsolable. Faible. Couillon. Meurtri. Qui s’en voulait. Il se disait qu’il aurait mieux valu que le fils disparaisse vraiment ce jour-là. Que la mer le prenne et ne le relâche pas. Le tue pour de bon. Au moins il aurait su. Il aurait su où il était. Mort. Bien mort. Dans les nuages ténébreux d’algues et de limons. Dans les courants bleu de Prusse. Dans les fonds sans fond. Cobalt. Gris. Transi. Flottant. Mort agité. Cadavre-cauchemar dévoré. Tandis que là. Il ne savait rien. Rien. Et cela le rongeait. Comme le sel sur une plaie. Le visage sur la lèvre blessée. Enfant. Mon enfant. Mon fils.”

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